11:26 TECHNIQUE

Une enveloppe qui tombe sur les façades, tel un rideau de scène

L’Arsenic, l’un des lieux phares de l’art scénique contemporain lausannois, est en pleine mutation. Avec un budget modeste de moins de 12 mio de francs, le bureau Pont 12 a conçu la transformation du bâtiment, caractérisée par des espaces fonctionnels et une enveloppe métallique qui tombe sur les façades, tel un rideau de théâtre.

Depuis sa création en 1989, l’Arsenic a très largement contribué à donner une identité culturelle au quartier de Sévelin, au cœur de Lausanne. Construit en 1955 à deux pas de la rue de Genève, le bâtiment du théâtre composait un ensemble avec l’Ecole professionnelle. Il était encore occupé en partie par l’ERACOM et le CFVI jusqu’au début des travaux de rénovation. Mais ce lieu phare de l’art scénique contemporain suisse (quelque 40 productions et coproductions par saison, 15’000 spectateurs en 2009) n’a bénéficié que de réparations ponctuelles et d’un entretien limité ces dernières décennies. Bien que l’aspect brut et minimaliste de son infrastructure fasse partie de son caractère, l’édifice n’était plus en mesure de répondre aux normes actuelles de qualité et de confort. La Ville de Lausanne a donc mis en place un programme de rénovation visant à inscrire l’Arsenic dans une nouvelle ère sans pour autant modifier radicalement l’essence du lieu. Objet d’un concours d’architecture remporté par le bureau lausannois Pont 12 en 2007, le nouveau théâtre devait répondre aux contraintes de sécurité, de fonctionnalité et d’économies d’énergie du bâtiment. Cette renaissance passe par la rénovation des façades, le remplacement des installations techniques, la mise en conformité des accès de secours et systèmes de sécurité. La récupération des locaux partiellement occupés par les écoles professionnelles (non mentionné dans le programme du concours) offre par ailleurs d’importantes nouvelles surfaces de travail pour des compagnies en résidence, tels que studio vidéo et son, atelier costume et deux salles de répétition. Les aménagements extérieurs, par contre, ne seront que très peu modifiés, de manière à conserver le caractère brut du lieu qui fait écho à la démarche d’expérimentation artistique exprimée entre ses murs.

Empreinte industrielle

«L’Arsenic est au cœur de la ville, dans une friche en mutation, un quartier contrasté. De jour, on y vient pour étudier dans ses quatre établissements de formation ou travailler dans les divers ateliers et bureaux. La nuit, le public vient voir les spectacles variés, au Docks, à Sevelin 36 ou à l’Arsenic, ou s’encanailler dans la rue. L’enjeu de notre intervention est d’apporter les améliorations nécessaires à un théâtre d’envergure, outil de travail scénographique avant tout, en trahissant le moins possible son caractère industriel et brut issu de son environnement immédiat, caractère que nous apprécions depuis longtemps», explique Olivier Neiva, responsable de projet pour le compte du bureau Pont 12. Le budget aidant, chaque démolition partielle, chaque élément nouveau est étudié et discuté le temps nécessaire, parfois long, chez Pont 12, avec la direction du théâtre, les ingénieurs, les services de la ville et les entreprises, dans une étroite collaboration, exigeante et conviviale. En respectant l’économie des moyens disponibles pour ce projet, avec un budget limité à 12 mio de francs, les architectes de Pont 12 proposent une meilleure distribution et clarification du parcours du public en redéfinissant l’entrée au foyer et en favorisant un meilleur accès aux salles. Les nouvelles régies en béton armé séparent et isolent les deux grandes salles entre elles (du feu comme du son). Les gradins de la grande salle, entièrement démontables, peuvent se disposer de façon traditionnelle, face à face ou disparaître complètement pour laisser l’entier de l’espace au jeu des acteurs, au milieu du public. Protégée par un avant-toit, la galerie d’entrée forme un couvert extérieur abritant les entrées et sorties du public ainsi que les transits des usagers. Les architectes de Pont 12 prennent également le parti de surélever la toiture des salles centrales, pour doter le théâtre d’un gril motorisé correspondant aux standards scénographiques actuels. Non mentionnée dans le programme du concours, cette transformation favorise une base minimale d’installations techniques (électricité, ventilation) compatible avec les exigences futures en matière de confort et de performances scéniques.

Rideau métallique

Les façades existantes sont typiques des années cinquante, avec poteaux et poutres visibles en acier, remplissages en briques et profils de vitrages très minces. L’isolation du bâtiment, sur l’ensemble de l’enveloppe, toiture, façades et vitrages, permettra de réduire fortement les besoins énergétiques et résoudra la plupart des problèmes de confort hivernaux et estivaux. «Le premier enjeu était de mettre en place une peau conforme aux nouvelles normes en réduisant les ponts thermiques. Nous avons cherché, avec les architectes, le meilleur compromis entre une peau esthétique et fonctionnelle qui rentrait dans le budget restreint», explique Laurent Félix, ingénieur civil pour le compte de BIFF SA. Avec les architectes, le bureau spécialisé dans la conception de façades, basé à Lausanne et Genève, a cherché à optimiser le système de sous-construction et des raidisseurs pour trouver un rythme de façades et un système de fixation qui permette d’optimiser la matière et d’apporter une certaine légèreté à l’ensemble.

L’enveloppe comprend deux couches successives, une isolation thermique et phonique épaisse, en laine minérale, très performante, puis une peau d’étanchéité extérieure en textile Stamisol® sombre qui donne la couleur de la façade. Cette dernière est recouverte par un bardage ajouré, sorte de tulle métallique, dont la fonction est de protéger la façade et modeler la volumétrie du bâtiment. Les sous-constructions seront posées avec des coupleurs thermiques à chaque pièce de fixation et des raccords d’étanchéité des pièces qui traversent l’étanchéité extérieure. «L’emballage thermique cachant la structure de l’ancienne façade, il fallait trouver un nouvel élément donnant sa cohérence à la nouvelle ‘’gueule’’ du bâtiment. C’est le rôle du rideau de tôle pliée et perforée, produit manufacturé standard, industriel et brut, qui joue subtilement avec la lumière, à la manière d’une tulle» indique Olivier Neiva.

Au niveau des installations techniques, l’électricité présente de nombreux problèmes de conformité et sera remplacée jusqu’aux différents tableaux secondaires de répartition. Les grandes salles de spectacle ainsi que le foyer et les locaux sanitaires seront ventilés mécaniquement, avec récupérateur de chaleur. Le bâtiment sera branché sur le chauffage urbain ; une nouvelle sous-station de chauffage avec échangeur assurera la production d’eau chaude sanitaire.

Démarré en juin dernier, le chantier entame actuellement la phase de second œuvre et la pose de la sous construction, puis du bardage de façade. L’inauguration est prévue au début 2013.

L’Arsenic en bref

L’Arsenic, ouvert en 1989 et devenu fondation en 1995, s’est développé au fil des saisons et est aujourd’hui une étape incontournable de l’art scénique contemporain. A la direction du théâtre depuis 2003, Sandrine Kuster multiplie les collaborations aux niveaux suisse et international, en lien direct avec la mission pluridisciplinaire du lieu. L’Arsenic joue aussi, et cela a été souligné dans le préavis de politique culturelle récemment adopté par le Conseil communal, un rôle important dans la programmation des compagnies indépendantes lausannoises. (EV)

Calendrier des travaux

Mandat d’étude parallèle: fin 2007-début 2008

Crédit d’étude: 2009

Permis de construire: 2010

Crédit de construction: 2010

juin 2011-janvier 2013: chantier

de rénovation

mars 2013: réouverture de l’Arsenic

Maître d’ouvrage

Ville de Lausanne - Service du Logement et des Gérances


Mandataires

Architectes:Pont 12 architectes SA

Ingénieur civil:Käkin & Cuerel SA

Ingénieur chauffage et Ventilation:Jakob Forrer SA

Ingénieur Sanitaire:Olivier Tinelli Etudes techniques du bâtiment

Ingénieur électricité:Thorsen Sàrl

Ingénieur physique du bâtiment:Mats-Ola Nilsson Ingénieur-conseil

Ingénieur acousticien:EcoAcoustique SA

Façades:BIFF SA Bureau d’ingénieurs fenêtres et Façades SA

INTERVENANTS

Maçonnerie

Bertholet + Mathis SA, Lausanne

www.bertholet-mathis.ch

Désamiantage

Assena SA, Tavannes

www.assena.ch

Installations électriques

Ciel électricité, Lausanne

www.cielelectricite.com

Etanchéité-ferblanterie

Balzan & Immer étanchéité SA, Lausanne

www.bie-sa.ch

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