Du polyéthylène pour un béton fibré plus écologique et plus léger
Un laboratoire de l’EPFL a mis au point un béton fibré ultraperformant beaucoup plus écologique que les matériaux usuels. Il a fallu trois ans de recherches pour remplacer les fibres en acier traditionnelles par du polyéthylène très rigide. Le nouveau matériau pourra prolonger la durée de vie de ponts et d’autres ouvrages de génie civil.
Amir Hajiesmaeili aime cuisiner et se débrouille plutôt bien dans ce domaine. Après un master en génie civil mené à l’Université de Téhéran, il a rejoint l’EPFL pour effectuer un doctorat. Durant près de quatre ans, il s’est aussi mis à «cuisiner» à l’EPFL, en mélangeant chaque semaine dans une cimenteuse différents types d’ingrédients sous la forme de poudre. Il a ainsi mis au point un nouveau type de de béton fibré ultraperformant (BFUP) aussi résistant que celui déjà utilisé sur les chantiers, mais moins gourmand en CO2. Il a ensuite soumis ses échantillons à différents tests de résistance et de déformation et affiné ses calculs.
L’acier remplacé
«Après trois ans d’échecs répétés, nous sommes finalement arrivés au mélange idéal, qui respecte, de surcroît, les hauts standards de la construction», explique l’ingénieur. La recette innovante, il l’a trouvée en remplaçant non seulement la fibre d’acier par une fibre synthétique de polyéthylène très rigide. Cela a permis une bonne adhérence avec la matrice cimentaire. Il a aussi remplacé 50% du ciment utilisé habituellement comme liant, par de la poudre de calcaire. «Le point le plus difficile était de trouver le matériau qui assurait au mélange une texture homogène tout en présentant une résistance élevée».
Pour les ponts
Le BFUP de première génération est utilisé pour renforcer les ponts depuis 15 ans selon une technologie développée en Suisse et exportée à l’étranger. Son bilan CO2 est déjà inférieur à celui du béton armé traditionnel. «Avec ce type de matériau, nous ajoutons de la plus-value aux ouvrages existants que nos ancêtres nous ont transmis, car nous rendons ces infrastructures quasiment éternelles», commente Eugen Brühwiler, directeur du Laboratoire de maintenance, construction et sécurité (MCS) de l’EPFL. Ce dernier a déjà supervisé le renforcement plus de 100 ponts et bâtiments en Suisse. «De plus, l’application de ce matériau est bien plus avantageuse que la démolition d’un ouvrage du passé et sa reconstruction», ajoute-t-il.
Déjà sur le pont
Le nouveau BFUP pourra se passer totalement des fibres en acier tout en conservant les mêmes propriétés mécaniques. Il est de 60 à 70% plus écologique que le matériau actuel et 10% plus léger. Ses propriétés sont si performantes qu’un premier transfert de technologie devrait avoir lieu en 2020 dans le cadre du renforcement d’un pont.