Une ZAD fait barrage à Holcim et sa carrière d'Eclépens
L'urgence écologique est invoquée par les militants qui occupent depuis samedi la colline du Mormont, près d’Éclépens (VD). Ils ont monté la première ZAD (Zone A Défendre) de Suisse pour protéger une zone naturelle convoitée par Holcim qui veut étendre sa carrière. Un combat mené aussi devant les tribunaux.
C'est David contre Goliath. Une fronde de la société civile contre le pouvoir des multinationales.
Dans le rôle du plus démuni, on trouve une cinquantaine de militants qui, avec bonne humeur et détermination, occupent depuis samedi une partie du plateau de la Birette, sur le haut de la colline du Mormont. Ils ont investi une maison inoccupée et en ont fait le QG de leur Zone A défendre, la première ZAD de Suisse, la ZAD de la colline. Leur but: protéger cet écosystème convoité par le cimentier Holcim.
Site stratégique
Dans le rôle du puissant, on trouve bien sûr LafargeHolcim, leader mondial du secteur cimentier, dont la filiale suisse exploite depuis 1953 la carrière d'Eclépens. Ce site stratégique, le plus important de Suisse romande, contribue à produire quelque 800'000 tonnes de ciment par année. Mais d'ici 2022, la source de calcaire se sera tarie. Alors pour répondre à la demande incessante du secteur de la construction, nourrir sa cimenterie et éviter une pénurie à l'échelle régionale, il lui faut s'étendre encore plus loin sur le plateau de la Birette.
Guerre de tranchée judiciaire
David n'est pas tout seul dans son combat pour préserver la zone. Plusieurs associations de défense de l'environnement, dont Helvetia Nostra et Pro Natura Vaud, ont engagé en 2019 une bataille judiciaire contre l’extension de la carrière. En effet, la nouvelle tranchée devrait mesurer 200 mètres de large sur 600 mètres de long et 70 mètres de profondeur. A leurs yeux, «l’extraction de 8,4millions de mètres cubes défigurerait le paysage et empiéterait sur le territoire de la faune. Si l’autorisation de raser le Mormont était délivrée, c’est un joyau des paysages vaudois qui disparaîtrait.»
Urgent d'agir
Les écologistes ont perdu une première manche devant le Tribunal cantonal vaudois qui a estimé que l’autorisation d’exploiter peut être délivrée sans que la remise en état du site soit définie. Un recours au Tribunal fédéral est pendant. Mais pour les zadistes de la colline, il n'y a plus de temps à perdre:«Face à la lenteur de l’action juridique, à l’impunité des multinationales, à l’absence de lois permettant de défendre réellement la nature, nous occupons... Les manifestations et les blocages occasionnels sans résultats concrets ne suffisent plus.»
Zadiste de durer
David attend des renforts et des soutiens ces prochains jours, ces prochaines semaines. Les activistes sont déterminés à rester jusqu'à la victoire finale. En face, Goliath dans sa tour de béton joue l'apaisement et la force tranquille. Par communiqué, Holcim affirme «prendre au sérieux les préoccupations de tous ses interlocuteurs» et ajoute qu’elle apporte «un soin très particulier aux zones d’extraction avant, pendant et après l’exploitation». A Eclépens par exemple, l’ancienne carrière Testori est devenue «une réserve naturelle à orchidées et à serpents rares inscrite à l’inventaire fédéral des prairies et pâturages secs d’importance nationale.» Pas étonnant dès lors que les zadistes se regroupent sous la bannière «Orchidées contre béton armé» et ils sont prêts à mordre pour les défendre.