Un centre automobile de Rossens tient le pari de la décarbonation
BMW vend bientôt un tiers de ses véhicules en mode électrique. Pour marquer ce virage vert, la concession de Fribourg mène une lutte sans concession au CO2. Les panneaux voltaïques sont posés sur toutes les surfaces disponibles. Sur les toits bien sûr, mais aussi en façade. La charpente est constituée d’acier recyclé ayant recours à 100 % d’électricité renouvelable. Et de nombreuses autres mesures font la chasse au gaspillage énergétique.
Crédit image: Jean-A. Luque
Le bâtiment est long de 68 m, large de 45 m en son point le plus étroit et 63 m au maximum; il culmine à 15,9 m. Le noyau principal se compose de 4 niveaux et un sous-sol. Des surfaces de bureaux sont adjacentes aux places de stockage sur les étages supérieurs
Impossible de le rater. Depuis quelques semaines, les automobilistes qui empruntent l’autoroute A12 distinguent, à mi-chemin entre Bulle et Fribourg, un bâtiment étincelant, blanc et bleu. Juste à la sortie de Rossens, le nouveau centre automobile Dimab arbore avec fierté sa façade en tôle thermolaquée et ses panneaux photovoltaïques bleu électrique. Un bloc sobre et élégant qui fait le pari de la décarbonation à tous niveaux.
Bien sûr, ce qui saute aux yeux, ce sont les 680 panneaux solaires accrochés aux murs. Ces verres photovoltaïques colorés Kromatix sont à n’en pas douter l’étendard de Dimab, la volonté affichée de lutter contre les émissions de CO2. «La marque BMW a des standards Green Building très ambitieux quand on construit une nouvelle concession, confirme Jean-Bernard Menoud, directeur général du groupe Dimab. C’est notre manière d’accompagner les utilisateurs vers des véhicules électriques, non polluants, qui représentent déjà quelque 30 % de nos ventes de véhicules neufs. Pour obtenir le feu vert de la marque, il faut obtenir un minimum de 100 points sur un maximum de 125. A Rossens, nous atteignons les 110 !»
La surface totale de panneaux photovoltaïques posés en façade représente 795 m². Couplée à des optimiseurs de puissance, l’installation est capable de générer 91,64 MWh au cours de l’année. Ce qui représente 35,92 t de CO2 épargnés ou l’équivalent de 1650 arbres plantés. «C’est aussi la consommation annuelle de 19 ménages, précise Jean-Bernard Menoud. L’investissement est conséquent: 600’000 francs. Il devrait être amorti en 15 ans.»
Crédit image: Jean-.A. Luque
Blanc thermolaqué et bleu électrique jouent en façade avec leur environnement.
La nouvelle technologie de Kromatix, développée en partenariat avec l’EPFL, permet de colorer le verre par pulvérisation cathodique (technologie des plasmas). Ce processus de coloration du verre par l’application de couches nanométriques n’utilise aucun pigment et laisse passer certains rayons du soleil, conservant ainsi la pleine efficacité des cellules photovoltaïques, même lorsqu’ils sont placés en façade. En termes de rendement, l’entreprise assure que les pertes en puissance ne dépassent pas les 3 à 12 % par rapport aux versions plus classiques.
Les panneaux font 1330 × 880 mm et sont posés devant la façade en tôle cassette thermolaquée de 3 mm. En fait, la façade a été conçue avec des encoches. Les panneaux d’une trentaine de kilos chacun ont été équipés de deux pièces d’inox collées à l’arrière du verre et quatre points d’accroche qui sont fixés au béton avec un porte-à-faux d’une quarantaine de centimètres.
Si les façades se veulent innovantes, le maître d’ouvrage a aussi voulu rentabiliser chaque surface disponible sur les toitures. Le bâtiment principal et le show-room accueilleront respectivement 700 m² et 800 m² de panneaux solaires. «Cette production électrique alimentera notamment les stations de recharge des véhicules électriques, explique le directeur général. Nous aurons deux bornes superchargeurs capables de fournir une puissance jusqu’à 360 kW et six autres plus conventionnelles de 21 kW.»
Empreinte
carbone extrêmement faible
Mais la chasse aux émissions de CO2 ne se limite pas à cette production
d’énergie verte. La structure traditionnelle du bâtiment se caractérise par de
grandes portées et d’importantes hauteurs. L’occasion pour Morand Constructions
Métalliques d'installer, pour la première fois en Suisse, une charpente en
acier décarboné. Les poutres d’acier «XCarb», conçues par ArcelorMittal, sont
en effet fabriquées à partir d'acier 100 % recyclé en utilisant 100 %
d'électricité renouvelable dans un four à arc électrique. L’électricité
utilisée dans le processus de fabrication de l’acier est vérifiée de manière
indépendante, avec une «garantie d’origine», étant donné qu’elle provient de
sources renouvelables.
Crédit image: Jean-A. Luque
Toutes les techniques disponibles en matière de construction durable ont été utilisées, notamment en ce qui concerne l'isolation du bâtiment.
Les hauts fourneaux des aciéries sont des consommateurs énergivores et relâchent d’importantes quantités de gaz à effet de serre. Mais avec «XCarb», l’empreinte CO2 est extrêmement réduite: 300 kg de CO2 par tonne d’acier. Morand Constructions Métalliques, qui affiche depuis longtemps sa détermination écologique, a travaillé jusqu’à présent avec de l’acier issu de la refonte de déchets, mais avec une filière d’électricité non renouvelable qui enregistre quelque 500 kg de CO2 par tonne d’acier. Une empreinte carbone déjà remarquable qu’il améliore encore avec «XCarb». A titre de comparaison, la filière d’aciérie classique dégage 1800 kg de CO2 par tonne d’acier! Six fois plus d’émissions de gaz à effet de serre!
«Nous avons découvert cette offre de produit décarboné en 2021, explique Jean-François Suchet, directeur général de Morand Constructions Métalliques. Le proposer à nos clients est une évidence et participe de notre volonté de développement durable. Car, même s’il a un léger surcoût de 2 à 4 % par rapport à un acier traditionnel, nous voulons faire découvrir ce produit qui a les mêmes propriétés qu’un acier normal, mais dont la seule différence est d’être en acier 100 % recyclé et 100 % fabriqué grâce à de l’énergie verte.»
Toutes les techniques actuellement disponibles en matière de construction durable ont été mises à profit pour faire de ce centre automobile un bâtiment exemplaire. L’isolation thermique est assurée par de la laine de verre Isover aux propriétés également anti-feu. Des triples vitrages habillent le lumineux show-room. Un échangeur thermique met à profit les puissants compresseurs d’air nécessaires dans le garage pour chauffer l’eau. L'ensemble de la centrale d'air comprimé, tout le réseau ainsi que les raccordements pneumatiques des différentes installations ont été aménagés par Schrad'air Compresseurs SA.
La climatisation se veut également écologique sans production de CO2. En effet, il s’agit de refroidisseurs d’eau dont la diffusion se fait par les panneaux rayonnants des faux plafonds. L’éclairage est également à la pointe du progrès avec l’utilisation de LED couplée à des détecteurs et horloges.
La consommation d’eau est également étudiée au plus près. Les WC sont particulièrement économes, mais c’est surtout la station de lavage des voitures et camionnettes qui retient l’attention. «L’eau est récupérée, traitée puis réinjectée dans le circuit de lavage, précise Jean-Bernard Menoud. Nous parvenons à en recycler 70 %.»
Les mesures prises pour préserver l’environnement en feraient presque oublier l’édifice, aussi bien conçu que pensé. Long de 68 m, large de 45 m en son point le plus étroit et 63 m au maximum, il culmine à 15,9 m. Le noyau se compose de 4 niveaux et un sous-sol. Ce dernier abrite toutes les installations techniques, mais dispose aussi d'un espace suffisant pour stocker 16 000 roues. Au rez, sur une surface de 1000 m2, l’atelier est équipé de 14 lifts.
Crédit image: Jean-A. Luque
Les panneaux photovoltaïques n'épargnent aucun centimètre carré de toiture.
L’espace show-room sur deux niveaux culmine à 8,45 m et dispose d’une surface d’exposition de 1700 m2. Les trois étages sommitaux du corps central sont des espaces de parking, des couverts pour stocker jusqu’à 51 véhicules par niveau. Le dernier bénéficie d’une hauteur de plafond plus élevée et abritera des camping-cars pour l’hivernage. A l’extrémité nord de ces trois niveaux, on trouve également des surfaces administratives de 200 m2 à la location. Un cabinet de physiothérapie et une étude d’avocats sont déjà preneurs.
D’ici la fin de l’année, le maître d’ouvrage a encore prévu de démarrer le chantier d’une carrosserie avec un four à peinture modulable de 6 m de haut et 21 m de long, capable de gicler voitures, mais aussi cars et camions.
Une trentaine de nouveaux employés prendront possession des murs dès le 1er août. Les premiers clients pourront, eux, découvrir ce nouveau centre automobile dès le 16 août. ■