Soutien financier du Canton au futur espace Chaplin de Corsier-sur-Vevey
Le Conseil d'Etat a décidé de soutenir le projet ambitieux de «Chaplin's World» en lui accordant un prêt de 10 millions de francs sans intérêt, soit près de 20% du coût de sa réalisation. A Corsier-sur-Vevey, il occupera le «Domaine de Ban» où Charlie Chaplin a passé les 25 dernières années de sa vie.
Consacré à l'oeuvre du cinéaste le plus célèbre du XXe siècle, le futur musée est destiné à devenir l'un des sites culturels et touristiques majeurs de Suisse.
Sur la base d'une analyse rigoureuse du dossier, et au regard de l'apport en terme de rayonnement que le futur espace consacré à Chaplin offrira à la région et au canton, le Conseil d'Etat a décidé d'accorder à la société Chaplin's World Real Estate Company un prêt sans intérêt de 10 millions de francs sur 25 ans pour contribuer à financer sa réalisation. Cette contribution cantonale représente 19% de la totalité des investissements nécessaires à la création du futur «Chaplin's World», estimés aujourd'hui à 53,5 millions; le solde étant financé par des capitaux privés. Cette décision constitue une étape déterminante.
Communes de la région appelées à faire un geste
Les communes de la région sont appelées à s'associer à ce soutien financier par une caution permettant de garantir ce prêt à hauteur de 8 millions de francs. Le prêt cantonal sera effectif une fois que les Conseils communaux concernés auront adopté ce cautionnement solidaire intercommunal et que le plan de financement des investisseurs privés sera définitivement fixé.
Le choix du site, les 14 ha du «Domaine de Ban» à Corsier-sur-Vevey où l'artiste a vécu de 1953 à 1977, enracine le projet dans la région et dans le canton. La notoriété de Charlie Chaplin, célèbre sur les cinq continents et dans toutes les catégories sociales, sa personnalité artistique universellement reconnue pour son oeuvre comme l'ampleur et le sérieux du projet sont des atouts propres à faire du futur musée l'un des sites culturels et touristiques les plus médiatisés à l'échelle internationale.
Par ce soutien financier, le Canton et les communes entendent contribuer à un projet favorable au rayonnement culturel et touristique de la région et du canton. Au-delà des retombées en termes économiques, ils sont également très heureux de soutenir un projet qui rend hommage à un artiste immense et universellement apprécié, qui a choisi voici plus d'un demi siècle le canton de Vaud pour demeure. (com)
Futur Musée Charlie Chaplin à Corsier-sur-Vevey
Des transformations d’envergure au manoir de l’illustre cinéaste
Cela fait dix ans que Philippe Meylan et ses partenaires rêvent d’un Musée en l’hommage de Charlie Chaplin, à la lumière des 25 dernières années de la vie du cinéaste sur la Riviera. Après avoir étudié la possibilité de créer un tel espace dans les anciens ateliers mécaniques de Vevey, l’ancienne demeure de l’illustre cinéaste s’est révélé être l’écrin symbolique idéal. Implantée à Corsier, dans le Domaine de Ban qui s’étend sur une surface de 132858 m2, cette maison de maître construite en 1840 est inscrite à l’inventaire des monuments et des sites du canton de Vaud. Grâce à l’impulsion de la Fondation du Musée Charlie Chaplin et Chaplin Museum Development SA, ce projet d’envergure estimé à plus de 60 millions de francs suisse et qui devrait attirer près de 250000 visiteurs par année est en passe de se concrétiser. Le permis de construire du «Chaplin Museum» ayant été délivré en juin dernier, plus rien n’entrave en effet la réalisation de ce projet emblématique pour la région. Le projet comprend notamment la transformation du manoir habité autrefois par le cinéaste et sa famille en musée. Les promoteurs prévoient de lui redonner son aura d’antan pour faire découvrir aux visiteurs les murs entre lesquels personnalités et célébrités artistiques, scientifiques et politiques des quatre coins du monde se sont entretenus avec l’illustre Charlie Chaplin. Toutes les grandes pièces retraceront la vie du cinéaste, son enfance, ses débuts, les sources d’inspirations de son œuvre cinématographique, sa famille et ses amis. Attenante au nouveau bâtiment du musée, la ferme existante conservera son apparence extérieure actuelle. L’intérieur, par contre, fera l’objet d’une métamorphose complète visant à créer des bureaux, des espaces techniques, ainsi que la billetterie, les services publics, une boutique et un café profitant d’une vue plongeante sur l’ensemble du domaine. Un nouveau bâtiment sera consacré à l’œuvre de Chaplin. Retour sur la genèse de ce projet capital avec son initiateur Philippe Meylan, architecte et président de la société Chaplin Museum Development SA.
Racontez-nous comment vous est venue l’idée de créer un musée Charlie Chaplin ?
PM - Tout d’abord, il faut savoir qu’ayant été voisin dans ma jeunesse du domaine du Ban, j’ai eu l’occasion de côtoyer la famille Chaplin, en particulier certains enfants du cinéaste. L’idée du musée est née d’une rencontre fortuite au Québec avec le scénographe et muséographe Yves Durand il y a dix ans. Dans son bureau où nous parlions affaires, il avait un énorme poster de Charlot et une bibliothèque remplie de livres consacrés au cinéaste qu’il admire sincèrement. Je lui ai raconté que j’avais eu l’occasion de le rencontrer de son vivant et, au fil de la discussion, nous avons plaisanté en disant qu’il faudrait que nous lui consacrions un musée. Trois semaines plus tard, il m’a appelé pour me dire qu’il voulait venir en Suisse pour en discuter.
Comment a réagi la famille Chaplin ?
PM - Très bien. En fait, le fils Eugène Chaplin avait déjà tenté de mettre sur pied un tel projet dans les anciens ateliers mécaniques de Vevey quelques années auparavant. Nous avons à nouveau analysé ensemble cette possibilité d’intégration dans un site industriel qui aurait bien collé à l’esprit des Temps Modernes. Pendant l’une de nos réunions, il m’a fait part du souhait de vendre le manoir parce que la bâtisse et son parc devenait une trop lourde charge pour eux. Le lieu s’est donc imposé comme une évidence, parce que cela me semblait inimaginable que le domaine perde toute relation concrète à son illustre propriétaire. Il a donc été décidé de créer une fondation pour le racheter tout en nous assurant de la faisabilité du musée, grâce notamment au soutien des dix communes du District. La famille nous a honoré de sa confiance sur la base des projets que nous avons réalisé. Elle nous met à disposition des archives et un patrimoine d’une valeur inestimable jusqu’alors conservés précieusement. Les meubles, tel le piano à queue sur lequel il a composé les musiques de ses derniers films, les œuvres d’art, les objets, livres, manuscrits et albums de famille, parfois inédits, seront ainsi révélés pour la première fois au grand public. Concrètement, les pièces principales dans lesquelles il a vécu, notamment la salle à manger, le salon, son bureau, sa bibliothèque, seront reconstituées.
La réalisation de ce projet a nécessité près de dix ans. Quelles ont été les étapes déterminantes ?
PM - Au cours de l’élaboration du plan de quartier, une opposition nous a porté un préjudice énorme. Après plusieurs années, elle a finalement été déboutée par le tribunal fédéral, mais ces démarches ont considérablement retardé le projet. Dans cette prolongation, nous avons été contraint de vendre le manoir à des partenaires financiers luxembourgeois. Ces derniers ont, à cette occasion, créé la société domaine du Manoir du Ban Luxembourg et se sont engagés à participer à la réalisation du musée. Depuis que nous avons obtenu le permis de construire, nous sommes en train de structurer le financement. Le projet a beaucoup évolué pendant cette longue période de gestation. Nous avons pu témoigner avec bonheur de la portée universelle du futur musée au fur et à mesure des rencontres avec des personnalités du monde du cinéma et des partenaires financiers et créatifs étrangers.
Quelle est l’architecture que vous prônez pour le nouveau bâtiment ?
PM - Le volume du nouveau bâtiment sera très simple. D’une longueur de 55 mètres et d’une largeur de 17 mètres, il formera un ensemble de 12000 m3, épousant les formes d’un studio de cinéma offrant à la découverte quelque 2000 m2 d’interventions scénographiques et multimédias. Il répondra aux soucis du respect de l’environnement en maximisant les ressources endogènes et naturelles, telles que la production d’énergie par des pompes à chaleur couplées à des sondes géothermiques, ainsi que la valorisation des ressources solaires pour la production d’eau chaude sanitaire. Au niveau de l’architecture, nous voulons privilégier une intégration harmonieuse dans le site naturel tout en donnant une certaine identité au bâtiment. La démarche n’est pas si simple, parce que nous ne voulons qu’il soit ni un ouvrage architectural trop typé d’un architecte de renom, ni un mausolée. Nous aimerions prôner une forme d’humilité et un esprit ludique assez représentatifs de la personnalité du cinéaste.
Une inauguration en 2012 est-elle réaliste ?
C’est une grande question. Nous ne serons pas en mesure de démarrer les travaux sur site tant que nous n’aurons pas le budget global. Nous espérons que la liste des partenaires financiers sera prochainement achevée. Ensuite, il faudra quelques mois pour réaliser tous les plans d’exécution et de soumission. Mais si les travaux débutent début 2011, une inauguration début 2013, est tout à fait envisageable.
Propos recueillis par Emilie Veillon