Nant-de-Drance, un chantier hydraulique en faveur du renouvelable
Le futur énergétique de la Suisse s’écrira en lettres hydrauliques. La nouvelle centrale souterraine de Nant-de-Drance, au-dessus de Finhaut (VS), va y contribuer pour faire face à la pénurie. Sa construction a duré 14 ans et le chantier a été le théâtre de nombreux exploits techniques et logistiques.
Crédit image: Nant de Drance
La nouvelle centrale n’est pas visible en surface. Elle a pourtant une puissance équivalente aux installations nucléaires de Gösgen.
C’est le
chantier de tous les superlatifs. Défis techniques hors-normes, logistique très
compliquée, rigueurs climatiques, tout a concouru à faire de la construction de
la centrale hydroélectrique de Nant-de-Drance, au-dessus de Finhaut (VS), une
vraie aventure. Pendant 14 ans, plus de 600 personnes ont créé des
installations de stockage de courant électrique en vue de réussir la transition
énergétique de 2050.
« Nous croyons à un approvisionnement électrique sans énergies fossiles ni nucléaire dans trente ans », a lancé Stéphane Maret, CEO des Forces motrices valaisannes, qui ont rejoint le groupe Alpiq pour ce projet. La Valais produit en effet 10 milliards de KWh par an et n’en consomme que trois. Assez pour faire de Nant-de-Drance le fer de lance du mix solaire/hydraulique, atout énergétique numéro 1 des Alpes.
Un pas vers la
transition énergétique
«La nouvelle
centrale n’est pas une installation de production d’électricité à proprement
parler», a rappelé la CEO d’Alpiq Antje Kanngiesser. Elle va servir de réserve
flexible, notamment pendant les périodes hivernales. D’une puissance de 900 MW,
elle peut doubler ce chiffre en cinq minutes pour répondre à des besoins d’urgence.
Sa mise en activité ne va pas résoudre tous les problèmes d’approvisionnement
que la Suisse risque de connaître l’hiver prochain. Mais elle offre une
alternative à la dépendance du pays aux énergies fossiles et au nucléaire provenant
des importations. Elle pilote enfin la promotion des énergies renouvelables.
Le chantier a été gigantesque. Le directeur de la centrale Alain Sauthier a estimé que l’aménagement de la caverne avec six groupes de pompage et de turbinage en a été le principal défi. Cette cathédrale est en effet accessible par un tunnel de 5,5 km de longueur, creusé sous 600 m de roche, entre les deux retenues d’eau d’Emosson. En tout, ce sont 18 km de galeries qui ont été aménagées sous la montagne.
Crédit image: Nant de Drance
Le barrage du Vieux Emosson a dû être rehaussé de 20 m pour fournir l’eau nécessaire au pompage et au turbinage de la nouvelle centrale.
Ensuite, le transport des pièces sur les lieux de la future centrale a été le théâtre de nombreuses prouesses. La machine la plus lourde pèse 300 t, et il a fallu de nombreux convois exceptionnels pour transporter tous les équipements techniques et les engins de chantier à 2000 m d’altitude. Le tout le long d’une route d’accès qu’il a fallu ouvrir chaque printemps. Enfin, le barrage du Vieux Emosson, construit en 1955, a été rehaussé de 20 m pour s’inscrire dans le projet de pompage/turbinage.
Crédit image: Nant de Drance
Le projet a permis de renaturer de nombreux espaces, jusque dans la plaine du Rhône.
Les deux lacs d’Emosson retrouvent leur quiétude, cachant une intense activité sous la montagne. Leur paysage naturel préservé dissimule une installation industrielle conçue pour 80 ans, voire davantage. Ce sont 20 milliards de gigawattheures qui peuvent être potentiellement produits sur place. Les CFF, présents sur le site depuis 1925, vont en bénéficier. Plus gros consommateurs du pays, ils vont pouvoir disposer d’un courant domestique 50 Htz destiné à leurs gares et à leur signalétique. Une vraie transition, eux qui avaient construit pour la traction des trains le premier barrage il y a un siècle à Emosson, retenue noyée dans le lac artificiel créé en 1975.