Le patrimoine se transforme en terre neuchâteloise d’opportunités
Située au cœur d’un quartier en plein développement au bord du lac de Neuchâtel, la villa Perret revit en hôtel pour entreprises. La transformation de cette bâtisse construite par un ancien consul au début du XXᵉ siècle distille un doux mélange de patrimoine et de modernité.
Crédit image: Philippe Chopard
Ancienne propriété d’un consul neuchâtelois, la villa Perret s’est ouverte au public et aux entreprises après une profonde rénovation.
Construite en 1902, la villa Perret revit depuis quelques semaines sur les bords du lac de Neuchâtel par l’accueil et l’hébergement de petites entreprises. Sa transformation, menée tambour battant malgré un chantier très complexe, ouvre ainsi la porte au développement de tout le quartier de l’est de Neuchâtel, auparavant zone semi-industrielle.
A l’origine de cette reconversion, une société privée issue d’Axess Management, une entreprise spécialisée dans l’investissement immobilier du groupe Realstone, à Lausanne. Celle-ci a pu racheter la maison de maître abandonnée depuis près de vingt ans pour la réaménager de fond en comble. Le tout en à peine six mois, comme le souligne l’architecte Laurent Siliprandi. Une gageure, vu que cette maison de quatre niveaux présente une valeur patrimoniale inestimable.
Bâtie en pierre jaune au fond d’un parc de 5000 m², la villa Perret est un témoin de l’art de construire au début du siècle passé. Elle n’a subi qu’une seule transformation en profondeur dans les années 1930. Après avoir été abandonnée par ses derniers propriétaires, elle a été mise en vente pour être finalement rachetée en 2012 par la Ville de Neuchâtel. Sans que cette dernière sache trop quoi en faire.
Christian Barbier, ancien directeur de l’appui au développement économique du canton de Neuchâtel, le savait, lui. « Nous avons présenté un projet qui a convaincu la Ville de me céder cette propriété pour lui donner un nouveau rayonnement », raconte-t-il. Il a fallu tout l’intérêt des conseillers communaux Fabio Bongiovanni et Violaine Blétry de Montmollin pour que l’affaire se conclue. Après une mise à l’enquête, les travaux ont pu débuter. « Nous avons évité le faux vieux, explique Laurent Siliprandi. Nous devions en effet relever une multitude de défis. A savoir maintenir le cachet architectural d’une maison de maître, l’adapter aux normes anti-incendie et y apporter la lumière naturelle. En plus de la rendre accessible aux personnes à mobilité réduite ».
Local technique
dans la cave à vin
La transformation de la villa Perret en hôtel pour entreprises n’a pas été une
sinécure. Il a notamment fallu refaire toute l’alimentation électrique du
bâtiment et le munir des liaisons informatiques nécessaires à sa future
activité. Tout est en fait commandé depuis un local de distribution au
sous-sol. Les entreprises ont la liberté de se connecter entre elles en cas de
besoin, ou d’équiper leurs locaux comme elles l’entendent.
Crédit image: Philippe Chopard
Marque la plus visible de la rénovation, l’aménagement d’une sortie sur le jardin a permis au maître d’ouvrage de reproduire la couleur et l’aspect de la pierre d’origine du bâtiment, avec un résultat qualifié de bluffant par l’architecte.
Sur place, il est difficile de distinguer précisément les vestiges de la villa d’origine, tant les nombreuses interventions du chantier se fondent dans le bâti. Elles ont été particulièrement lourdes au sud, au niveau du jardin. Les anciennes caves du sous-sol ont été totalement transformées en espace de co-working, avec la venue de diverses sociétés. Il a fallu pour cela ouvrir des fenêtres au niveau du sol et aménager une entrée du côté du jardin, avec la reproduction d’un escalier en demi-cercle qui répond à ceux qui mènent à la terrasse principale. Le résultat visuel du béton employé pour cet escalier et les murs de la nouvelle entrée est bluffant par rapport à la pierre d’origine, avoue Laurent Siliprandi. La technique des locaux de ce « rez-de-jardin », comme l’architecte a baptisé ce niveau inférieur, est toujours apparente. Cela pour proposer des locaux à hauteur de plafond suffisante. La lumière entre ainsi du sud et de manière transversale, dans des locaux autrefois sombres qui abritaient la cave à vin de l’établissement. Les effets négatifs du co-working sont de plus gommés par l’aménagement de petites salles réservées à des réunions confidentielles ou pour passer tranquillement des coups de fil.
Vestibule
agrandi
En entrant du côté nord, le visiteur est tout de suite frappé par le vaste
vestibule de la maison. La cloison qui le séparait des pièces au sud a été
supprimée en maintenant deux piliers portants. Le tout s’ouvre ainsi sur le
parc au sud, via un café-restaurant flanqué de deux autres pièces propices aux
réunions d’affaires et aux échanges. « Nous avons repensé ces deux ailes,
précise Laurent Siliprandi. L’une était à l’origine un petit couvert et l’autre
une terrasse. Nous en avons fait deux espaces supplémentaires. » De même,
la présence d’un café restaurant a obligé les responsables du chantier à
prévoir un bloc sanitaire supplémentaire à ce niveau.
Salle de bains
devenue bureau
A l’étage, accessible par un escalier monumental agrémenté d’une vaste
ouverture vitrée sur le nord, tout a été également transformé. L’ancien logis
des maîtres de maison a été reconverti en plusieurs vastes pièces. Celle située
au nord-ouest était en fait la salle de bains. Elle propose maintenant un vaste
espace de bureau. A l’opposé, le local occupé par cba, une société
d’appui à l’innovation gérée par Christian Barbier, a été aménagé à partir de
trois pièces à l’affectation différente. « Nous avons dû abattre de nombreuses
cloisons, indique encore l’architecte. Nous avons respecté les grandes hauteurs
de plafond. Les boiseries et les plinthes ont été restaurées et repeintes en
gris. Nous avons posé de nouveaux parquets et enlevé les tapisseries qui
ornaient encore les murs. »
Doubles
fenêtres conservées
Les combles de la villa étaient occupés par des chambres de bonne, autrefois
réservées aux domestiques de la maisonnée. Le chantier les a aménagées en
locaux pour diverses sociétés. Dans la vaste pièce située au sud, les doubles
fenêtres ont été conservées, quoiqu’à nouveau jointoyées et vernies. Les
surcombles, qui étaient totalement inutilisées, ont été aussi transformés en
espace de détente commun aux occupants de la maison.
Crédit image: Philippe Chopard
Un contraste vivant entre le carrelage d’origine du hall d’entrée et le terrazzo utilisé dans les dépendances.
L’accès aux personnes à mobilité réduite a aussi nécessité la pose d’un ascenseur vitré sur les quatre niveaux de la maison. « Nous avons dès lors constaté que les dalles qui séparent les étages étaient construites de trois manières différentes », explique encore Laurent Siliprandi. Y percer une cage d’ascenseur était donc complexe. De même, les responsables du chantier ont réhabilité une ancienne cage d’escaliers à l’est pour servir de voie de fuite en cas d’incendie.
Pourtour scruté
La toiture en tuiles et sa ferblanterie de cuivre ont aussi été totalement
rénovées. L’étanchéité de l’enveloppe a été renforcée et le pourtour du
bâtiment totalement excavé pour en vérifier la statique. Fort heureusement, la
villa ne se trouve pas en zone inondable, même si elle se trouve à quelques
dizaines de mètres des rives du lac sur du terrain remblayé il y a un siècle.
Les arbres du parc ont pu être presque intégralement conservés. La Ville de
Neuchâtel a aussi profité des travaux de transformation pour aménager une bande
cyclable au sud. Le parc, autrefois fermé aux visiteurs, peut dès lors
accueillir divers animations et évènements publics. Un sacré changement pour
cette propriété que personne n’osait fréquenter dans le passé vu son caractère
privé.
Locaux déjà
loués
La villa Perret offre désormais 21 espaces de bureaux, désormais entièrement
loués après quelques mois d’exploitation. Il s’agit du premier hôtel pour
entreprises du canton de Neuchâtel. Elle est bien desservie par les transports
publics et profite de la proximité d’un hôtel et d’une sortie d’autoroute. Dans
son voisinage immédiat, l’hôtel Palafitte, construit à titre provisoire pour
Expo.02 et enfin pérennisé, offre des possibilités d’hébergement haut de gamme.
« Nous sommes ici en vraie terre d’opportunités, souligne Christian Barbier.
J’en veux pour preuve que les personnes intéressées en ressortent séduites dès
leur première visite de notre villa. » Et son succès ne se dément pas !