Des étudiants de l’hepia planchent sur des abris de crise
A Genève, la haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture (hepia) inaugure un programme de recherche original sur la problématique architecturale de la migration. Menées en partenariat avec la Fondation Braillard Architectes et les étudiants en master d’architecture, les recherches de ce semestre devront déboucher sur des idées de projets d’hébergement provisoire autant pour les requérants d’asile qu’en cas de crise humanitaire ou de catastrophe naturelle, en Suisse ou ailleurs.
Partout dans le monde, ONG et architectes travaillent en étroite collaboration pour trouver des solutions aux crises migratoires, aux tsunamis, cyclones ou inondations. Shigeru Ban (prix Pritzker 2014) avait planché sur la question des hébergements d’urgence après s’être rendu dans les villages détruits par les tremblements de terre au Népal en 2015. Alejandro Aravena (prix Pritzker 2016) a fait du logement social et humanitaire son cheval de bataille. Cette problématique architecturale a besoin de solutions neuves. Pour les étudiants de l’hepia, il s’agira tout d’abord d’identifier les besoins en cas d’afflux de réfugiés, puis de trouver à Genève des sites potentiels pour accueillir temporairement de telles infrastructures. Ensuite, davantage que de dessiner des plans d’abris, le but est de travailler sur la planification des projets et de résoudre les questions de logistique.
Un contexte différent
L’abri doit souvent être autonome au niveau de ses ressources énergétiques car coupé de toute infrastructure. L’aspect environnemental est essentiel car l’installation des logements d’urgence ne doit pas détériorer l’environnement. Philippe Bonhôte, professeur à l’Hepia explique «Nous ne demandons pas aux étudiants de concevoir des abris, parce qu’il y a déjà beaucoup de choses qui existent dans ce domaine. Nous voulons surtout qu’ils apprennent à travailler dans un contexte différent, c’est-à-dire dans l’urgence et pour une situation éphémère. Il faut savoir prendre des décisions rapides et collaborer avec toutes sortes de partenaires, l’Etat, des ONG, etc.»
Le programme inclut une dimension participative, impliquant les principaux intéressés: les migrants et les voisins des lieux d’hébergement. «Il s’agit de comprendre les besoins des uns et des autres, précise Philippe Bonhôte. La concertation est indispensable dans les situations d’urgence, cela permet paradoxalement de faire avancer les choses plus vite et plus efficacement.»
Ivan Vuarambon, architecte spécialisé dans l’humanitaire, assure la partie pratique de ce programme. Il est l’auteur de plusieurs projets d’urgence au Sri Lanka, au Liban, et au Soudan, entre autre. Il souligne que l’acceptation des réfugiés par les voisins des lieux d’accueil est le principal défi sur le terrain: «Le choix du site est déterminant. Plus il est proche de la population résidente, plus l’intégration des requérants d’asile est réussie.» Et il ajoute que le lieu idéal doit préserver l’intimité et la dignité des hébergés. Les travaux des étudiants feront l’objet d’une exposition à la fin de l’année.
Selon Ivan Vuarambon, ce programme de recherche suscite beaucoup d’intérêt et il n’y aura pas de place pour tous les candidats. «A ma connaissance, la formation d’architecte d’urgence n’existe nulle part. J’ai dû apprendre sur le tas.» En cas de succès, le programme sera reconduit.