Entre émotion et frissons, les tours humaines ont pris d’assaut les arènes
Classés au
patrimoine mondial immatériel de l'UNESCO, les «castells» - tours humaines de Catalogne
- sont un défi aux lois de la physique.
Ces constructions éphémères et fragiles voient hommes, femmes et enfants s’empiler
comme des briques jusqu'à plus de onze mètres. Le week-end dernier, les arènes de Tarragone
ont accueilli les 30 meilleures équipes de l’année pour le célèbre Concours de
Castells, l’équivalent du championnat du monde. Reportage photo.
Ils sont là par milliers. Vieux, jeunes et même enfants de cinq ans. Hommes et femmes, gamins et fillettes. Tous réunis dans l’immense arène de l’ancienne place de taureau de Tarragone, en Catalogne. Le Concours de Castells de Tarragone a 92 ans. A l’origine, ce n’était qu’un prétexte à rencontre des «colles castellers» - les équipes de châteaux . Mais aujourd’hui, le concours bisannuel est devenu un officieux championnat du monde, une incroyable attraction culturelle et touristique, véritable ode aux valeurs du peuple catalan.
Jusqu'à 10 étages
Le principe est simple: ériger la tour
humaine la plus haute et spectaculaire possible. Pour cela, les «castellers» se
tiennent sur les épaules les uns des autres et montent les niveaux, qui peuvent
atteindre jusqu'à 10 étages. En principe, c’est toujours un enfant muni d’un
casque qui grimpe à son sommet. Le «castell» est achevé quand celui-ci lève
un bras en l’air, mais il n’est validé que lorsque les participants sont
revenus à terre et qu’il n’y a plus de risque de chute.
Les «castells» se construisent au rythme d’une musique appelée «toc de castells» dont les participants suivent la mélodie pour coordonner leurs mouvements. Les tours se composent de trois parties. La «pinya», la base de la tour, un socle sur lequel repose tout le poids de la construction et dont le rôle consiste aussi à amortir les chutes. Le tronc, lui, fait office de colonne vertébrale, structure verticale qui fait la liaison entre la base et le sommet de la tour. Et finalement, le «pom de dalt» - pomme du haut – composé de jeunes femmes et d’enfants aussi agiles que des singes, capables de grimper le long des corps jusqu’au sommet .
Les structures sont notées en fonction du nombre de niveaux, mais aussi de leur complexité : la quantité de «castellers» qui compose chaque étage de la tour, la structure simple, double ou même enchâssée. On s’en doute, tout est savamment orchestré. Les équipes venues des quatre coins de Catalogne s’entraînent avec assiduité plusieurs fois par semaine.
Force et équilibre, ingéniosité et solidarité, confiance et dépassement de soi. Au-delà de la compétition et des rivalités amicales, le monde des «castells» met à l’honneur les valeurs de partage, de confiance et de persévérance. Car ces tours humaines sont bien plus qu’un spectacle, elles sont une manifestation des valeurs du peuple catalan, de sa culture et de son histoire.
Teambuilding
La valeur
collective et individuelle de cette tradition est si importante qu'aujourd'hui,
de nombreuses entreprises qui souhaitent motiver leurs employés avec des
activités de teambuilding et de coaching, réalisent des activités ou des
ateliers de «castells».
Il est très difficile d’obtenir des places pour assister au grand concours biennal pris d’assaut par les supporters, mais les «castells» accompagnent tous les temps forts du calendrier festif en Catalogne. Il est possible de les voir tout au long de l’année lors des grandes fêtes populaires ou religieuses. Souvent, les tours humaines sont alors érigées devant les balcons des hôtels de ville ou sur les parvis des églises, voire la cathédrale de Tarragone.
Pour la petite histoire, ce sont les archifavoris Castellers de Vilafranca qui ont remporté le concours. Ils ont déjà 13 victoires à leur actif, dont seulement deux défaites depuis 1996.