Un centre de production couleur café
Après une série de travaux préparatoires, la première pierre de la nouvelle usine Nespresso à Romont a été posée en avril dernier. Imaginé par le bureau lausannois Aubert Architectes SA, ce nouveau centre de production répondra aux exigences du label durable international LEED. Il devrait être opérationnel début 2015.
Près de 27 ans après avoir ouvert le segment du café portionné, et ses deux centres créés à Orbe et à Avenches, Nestlé Nespresso SA entame la construction de sa troisième usine de production à Romont. Imaginée par le bureau lausannois Aubert Architectes SA, l’usine fonctionnera 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, avec trois rotations d’équipes la semaine et deux le week-end. «Ce site nous permettra de répondre à la demande croissante des consommateurs du monde entier pour les cafés Nespresso. Il s’agit d’un investissement stratégique à long terme qui nous permettra de soutenir la croissance future de Nespresso dans le monde», déclare Patrice Bula, Directeur général de Nestlé SA, en charge des unités d’affaires stratégiques, marketing et ventes, et Président de Nespresso. Pour cela, un budget de plus de 300 millions de francs suisses est prévu, dynamisant par la même occasion l’économie de cette région fribourgeoise. Près de 200 emplois directs et qualifiés seront créés lors de la première année d’activité en 2015, atteignant 400 à fin 2016. Le site choisi dans la zone industrielle «En Raboud» se trouve dans l’une des sept zones stratégiques d’activités d’importance cantonale, à proximité immédiate de la ligne de chemin de fer Berne-Fribourg-Lausanne et à laquelle l’usine sera raccordée pour le transport des marchandises.
La même logique qu’à Avenches
Le centre de production suit la même logique que celui d’Avenches, avec une zone de production reliée au réseau ferroviaire et un bâtiment administratif. Le site comprendra ainsi une zone de déchargement du café vert, des silos pour conserver le café, des espaces de torréfaction, des lignes de production, des zones de stockage des matériaux d’emballage et un centre d’expédition des marchandises. Pour s’assurer d’une certaine flexibilité dans les années à venir, la multinationale s’est donné la possibilité de doubler son site de production, symétriquement du côté aval du site. Cette extension fait partie intégrante du projet de construction et figure dans les plans architecturaux et le permis de construire du centre de production. Au niveau du concept architectural, les architectes ont cherché une image représentative de l’identité de Nespresso et porteuse d’une dimension symbolique de l’entreprise, sans être ostentatoire pour autant. «L’une des données du projet était de minimiser l’impact visuel des bâtiments très imposants, dont le silo café vert en point haut, fin et monolithique, atteint une quarantaine de mètres de haut. Pour cela, nous avons cherché à varier les hauteurs des différents secteurs et ramené les espaces les plus hauts en partie centrale pour offrir le découpage d’une grande plateforme. Autrement dit, on conserve un seul horizon duquel émerge des volumes», développe Vincent Aubert, fondateur et administrateur du bureau d’architectes basé à Lausanne. «Elément emblématique du projet, la façade est un élément traité avec finesse, en référence à la minutie avec laquelle Nespresso sélectionne ses cafés, en contrôle la qualité et les transforment en Grands Crus tout en sublimant et protégeant ses arômes. Tout le défi résidait dans la nécessité de recourir à des matériaux simples et économiques au vu des gabarits du centre, tout en cherchant des solutions de meilleures factures. Nous avons donc opté pour une simple tôle teintée dans les tons taupe pour évoquer la couleur du café, tout en recherchant une harmonie avec le paysage environnant» détaille l’architecte. Il a, de plus, privilégié des modules horizontaux en trompe l’œil, réduisant ainsi les hauteurs, tout en jouant avec la superposition d’éléments triangulaires s’apparentant au moellon et créant ainsi un effet de vibration de l’enveloppe. Les lectures varient donc au fil de la journée en fonction de la lumière et instaure un dialogue avec la muraille de la vieille ville de Romont.
Concept global de durabilité
«En tant que partie intégrante du programme de développement durable Ecolaboration™ de Nespresso, le nouveau centre de production sera construit et mis en fonction de manière à réduire son empreinte environnementale et à contribuer positivement à la communauté locale. La durabilité est un élément stratégique du projet», note la multinationale sur la page Internet du projet. Plus concrètement, la conception, la construction et l’exploitation de l’infrastructure s’inscrit dans le cadre de la plateforme de développement durable du label nord-américain Leadership in Energy and Environmental Design (LEED). Créé par le US Green Building Council en 1998, ce système de standardisation de bâtiments à haute qualité environnementale est semblable à Haute Qualité Environnementale en France. Les critères d’évaluation incluent notamment:l’innovation et processus de conception, l’emplacement des bâtiments dans un contexte socialement et écologiquement viable, une utilisation du terrain qui minimise l’impact sur le site, une gestion efficace de l’eau avec des mesures de conservation à l’intérieur et à l’extérieur. Mais aussi une haute performance énergétique de l’enveloppe du bâtiment et des équipements, l’utilisation efficace des matériaux, la sélection de matériaux écologiques et la réduction des déchets, ainsi que la qualité des environnements intérieurs en matière d’ergonomie et de confort de travail.
Priorité au transport ferroviaire
Ainsi, des technologies de pointe, en particulier pour les torréfacteurs, seront utilisées afin d’accroître l’efficacité et la productivité du site tout en réduisant l’impact environnemental des opérations. La priorité sera donnée au transport ferroviaire pour l’approvisionnement en matière première et la distribution des produits finis. «A cet effet, une voie de chemin de fer sera aménagée pour raccorder l’usine au réseau de chemin de fer existant. Un système de récupération de chaleur des torréfacteurs est prévu pour chauffer l’usine et cette dernière sera raccordée au projet de chauffage à distance de Romont. En complément, environ 2000 m2 de panneaux solaires seront installés sur le toit, avec un système de récupération d’eau de pluie pour l’alimentation en eau sanitaire ainsi que pour les tours de refroidissement du process», relève l’architecte. Au niveau du concept paysager, le projet prévoit une grande esplanade piétonne devant l’usine, une bande végétalisée entre le bâtiment administratif et le parking pour créer un poumon vert et une arborisation le long de la route de Lausanne, à l’est du site, avec des arbres et une haie d’espèces indigènes. L’architecte a aussi décidé de garder le seul arbre qui se trouvait sur le terrain à bâtir:un chêne centenaire, judicieusement placé face à l’entrée. Autre choix stratégique, le parking ne dispose que de 300 places pour près de 800 employés. Un concept de mobilité douce et multimodale a été imaginé, avec une station de vélos en libre-service devant l’usine, un bus navette qui pourrait être instauré entre la gare et l’usine d’entente avec la commune, des incitations au co-voiturage, ainsi que des places de parc réservées exclusivement aux véhicules hybrides comprenant des bornes de chargement.
Mode durable dans les moindres détails
«Le bâtiment est pensé en mode durable jusque dans ses moindres détails, avec une foule d’éléments d’économie d’énergie. Le centre est éclairé entièrement par la technologie LED. Les places de travail sont normalisées avec un éclairage bas, fonctionnant sur détecteur et les toitures plates sont blanches pour minimiser le phénomène d’ilôt de chaleur. Bien qu’il existe d’ores et déjà des bâtiments porteurs du label LEED en Suisse, le centre est non seulement l’un des premiers bâtiments d’une telle envergure en Europe, mais c’est aussi un centre de production avec lequel nous arrivons à répondre à des exigences conçues initialement pour des bâtiments locatifs et commerciaux. C’est donc tout un défi !», se réjouit Vincent Aubert, qui a collaboré pour l’occasion avec le bureau parisien ThemaVerde spécialisé en certification LEED et concepts énergétiques.
Travaux préparatoires dès novembre 2012
Les travaux de préparation du terrain ont commencé au mois de novembre 2012 et ont évolué dans des conditions météorologiques pénibles, marquées par de fortes précipitations et des températures négatives. «La phase préparatoire a consisté notamment à former le ceinturage du site avec une clôture de sécurité, ainsi que la pose de structures temporaires sanitaires et d’approvisionnement en électricité qui seront utilisées pendant la durée des travaux. En parallèle, des travaux spéciaux ont accompagné le terrassement et la consolidation du talus qui accueillera le raccordement à la voie CFF», explique l’architecte. Des sondages effectués sur le terrain ayant révélé la présence d’anciens déchets de construction dans le sol, des travaux de dépollution ont été effectués sur le terrain sous la responsabilité de la commune, en parallèle. «Une fois cette phase préliminaire achevée, les premiers éléments construits ont été les tunnels de fuite sous le site de production. Nous sommes actuellement en train de poser le radier. Les qualités du terrain sont excellentes, le bâtiment est donc bâti simplement sur du terrain stabilisé. Ensuite viendront les noyaux qui accueillent les services, les cages d’ascenseur et d’escalier, puis nous monterons la charpente métallique», poursuit Vincent Aubert.
Travaux spéciaux d’envergure
En parallèle, la création de la liaison ferroviaire nécessite des travaux spéciaux. Selon le tracé choisi, elle se déroule entre les voies CFF existantes et la route de Lausanne, puis doit passer sous le giratoire à trois branches reliant les routes de Lausanne, d’Arruffens et de Siviriez. «Le site à disposition est particulièrement restreint. L’entrée de ce passage, d’une quarantaine de mètres de long et de 7 m de large, est prévue au sud du giratoire, entre la route de Lausanne et les lignes CFF à 8 mètres seulement. Mais ce n’est pas tout, nous devons aussi gérer la présence des deux autres routes cantonales et, plus à l’est, de la ligne TPF reliant Bulle et Romont», analyse Fabrice Conus, ingénieur responsable de la direction des travaux pour le compte du bureau MGI-Genilloud SA à Romont. Face aux contraintes causées par la proximité immédiate des voies CFF très sollicitées et des trois branches de routes cantonales devant rester ouvertes à la circulation, les intervenants ont opté pour une excavation en taupe. «Nous sommes en train de réaliser les murs de culée en exécutant une série de pieux séquents de 80 cm de diamètre, forés à 14 m de profondeur. A partir du mois de juin, on commencera à exécuter la dalle qui s’étend d’un côté à l’autre du passage, puis l’excavation, avec la fin des travaux prévue en décembre prochain», estime l’ingénieur.
Maître de l’ouvrage
Nestlé Nespresso SA, Romont
Architecte & Direction des Travaux
Aubert Architectes SA, 1007 Lausanne
Ingénieur civil
Perret-Gentil & Rey + Associés SA, 1006 Lausanne
Ingénieur géotechnique
De Cérenville Géotechnique SA, 1024 Ecublens
Géomètre officiel
Geosud SA, Ingénieur-géomètre, 1680 Romont
Ingénieur CVSE
GB Consult AG, 4051 Bâle
Ingénieur services généraux
Stulz H + E AG, 3202 Frauenkappelen
Concept sécurité incendie
Richard Conseils Sàrl, 1627 Vaulruz
MGI Genilloud SA, 1680 Romont
Etude d’impact
Prona SA, 1401 Yverdon-les-Bains
Travaux préparatoires - Terrassement
CPC 3 Romont, 1680 Romont
Travaux préparatoires – Sanitaires
Saniclean Sàrl, 1680 Romont
Génie civil – béton armé – maçonnerie
Consortium CPC 3, 1680 Romont / Grisoni Zaugg SA
Ascenseurs – monte-charges
Kone SA, 1010 Lausanne
Echafaudages
Roth Echafaudages SA, 1700 Fribourg
Charpente métallique
Sottas SA, 1630 Bulle