L’EPFL a ausculté l'histoire de l’architecture des dortoirs
Un ouvrage de l’EPFL basé sur l’analyse de plans retrace l’histoire des dortoirs, du Moyen Age à notre époque. L'étude vise à comprendre l’équilibre à adopter entre intimité et collectivité et à répondre aux défis actuels en architecture.
Crédit image: EAST Lab / EPFL
Au travers des siècles, les êtres humains ont constamment remanié leur manière de dormir en communauté.
Colonie de vacances, auberge de jeunesse, orphelinat, base militaire, monastère, hôpital, ferry, train de nuit, camps de réfugiés. Dormir dans un dortoir survient généralement dans un contexte de vie particulier, limité dans le temps ou à la suite d’un évènement exceptionnel. L’architecture de ces espaces n’a cessé d’évoluer selon les croyances religieuses, les structures sociales, les connaissances scientifiques et les idéologies politiques.
A l’EPFL, un cours de dernière année de bachelor en architecture dirigé par le Laboratoire d’architecture élémentaire et d’études typologiques (EAST) a souhaité explorer l’histoire architecturale des dortoirs, de l’époque médiévale à ses formes les plus contemporaines. Un ouvrage en anglais résume l’ensemble de ces réflexions.
Crédit image: EAST Lab / EPFL
Diagramme des plans d'hospices cruciformes présentés comme cas d'étude.
La première partie de l’ouvrage présente trois groupes historiques de dortoirs. Le premier exemple est celui des hospices médiévaux, qui accueillaient les pauvres, les pèlerins et les l’évolution dans la construction, notamment avec l’introduction des systèmes de ventilation en toiture. Il a été finalement abandonné pour un agencement linéaire, lorsque les hôpitaux furent confiés aux municipalités. La découpe des dortoirs en petits espaces séparés par des rideaux suspendus est apparue au début du XXᵉ siècle pour évoluer jusqu’à l’apparition de la chambre d’hôpital individuelle.
L’étude de l’EPFL développe deux autres rétrospectives: l’une sur l’agencement des dortoirs de camps de vacances fascistes et soviétiques, comme partie intégrante de l’endoctrinement des enfants, et l’autre, sur les cabanes de montagne, avec la contribution décisive de l’architecte suisse Jakob Eschenmoser. Chaque projet étudié a permis par exemple de comprendre l’importance de l’espace à donner autour de chaque lit pour recréer une forme d’intimité.
La deuxième section du livre dévoile une trentaine de dessins de dortoirs issus de différentes époques que les étudiantes et étudiants de l’EPFL ont analysés et reproduits à partir de plans historiques, pour mieux en comprendre la forme, le contenu et le sens.
Crédit image: EAST Lab / EPFL
Deux études de cas analysées par le laboratoire EAST: l'Hôpital Notre-Dâme des Fontenilles à Tonnerre, dans l'Yonne (à gauche) et le Refuge Tonneau, en montagne, de Charlotte Perriand, situé en Haute-Savoie (à droite).
Dans le cas d’un sanatorium destiné aux enfants atteints de tuberculose, des étudiants relèvent par exemple que les lits sont situés très proches les uns des autres, peut-être pour rassurer les petits malades, et que des chaises longues sont installées près d’une baie vitrée, afin de faire entrer la lumière, considérée comme partie intégrante du traitement. Les recherches scientifiques sur la tuberculose imposeront progressivement l’ajout de fenêtres et l’aération régulière de ces espaces, mais aussi l’installation de lits sur roulettes, afin de pouvoir les déplacer en terrasse. Dans ce contexte, les architectes porteront de plus en plus attention à la vue que les malades auront depuis leur lit, jusqu’à faire parfois de cet élément le point de départ du projet architectural.
Etude de cas au
niveau international
Monastère indien, hôtel londonien, wagon-couchette russe, camp de vacances
italien, cabane de montagne suisse, caserne de pompiers allemande. Les exemples
traités par les jeunes architectes de l’EPFL ont couvert un large panorama architectural.
Comprendre la meilleure manière de dormir ensemble tout en tenant compte des
valeurs communautaires et du bien-être individuel répondait aux multiples défis
tels que les pandémies, les catastrophes naturelles ou les guerres qui
impliquent le déplacement et le logement en urgence d’un grand nombre de
personnes.
Cette publication est la première d’une série que souhaite poursuivre le Laboratoire EAST sur l’étude d’éléments architecturaux uniques qui se répètent.