Les Trente Glorieuses du béton armé aux Etats-Unis racontées dans un livre
Le professeur Roberto Gargiani raconte l’histoire de l’âge d’or du béton armé aux Etats-Unis, entre 1940 et 1970, dans un livre fleuve. Il relate à quel point ce matériau a voulu supplanter l’acier, de la simple maison jusqu’au gratte-ciel.
Crédit image: EPFL
Un livre de 900 pages pour relater la recherche de la pureté du béton, au détriment de son aspect brut.
Professeur à l’EPFL, Roberto Gargiani relève un défi un peu fou : relater dans un seul livre l’un des principaux pans de l’architecture américaine. Son ouvrage, de plus de 900 pages, traite en effet la production de béton armé aux USA de 1940 à 1970. Soit une période charnière de la construction outre-Atlantique, de la maison au gratte-ciel.
Nouvelle vie
La crise économique des années 1930 a eu raison de l’enthousiasme de la grande construction en acier aux Etats-Unis. L’Europe et le Japon se reconstruisent après la Seconde Guerre mondiale, et cela donne au béton armé une nouvelle vie.
La matière est le sujet
Roberto Gargiani fait du béton le protagoniste principal de son œuvre, conçue comme un vaste panorama à l’échelle de l’immensité du territoire américain. Une « découverte archéologique », par strates, d’un esprit de conception où évoluent les architectes, ingénieurs et bureaux d’études de l’époque. « Le sujet, c’est la matière, comment elle a évolué, mais aussi les structures qu’elle a rendues possible, la finition, les ornements », explique l’auteur.
Crédit image: Istock
Le musée Guggenheim de New York, inauguré en 1969, illustre la recherche de l'imitation de l'acier dans le béton armé de l'époque.
Dès 1940, les grands architectes tels le précurseur Frank Lloyd Wright, Louis Kahn, Paul Rudolf ou Ieoh Ming Pei, et les grands bureaux comme SOM (Skidmore, Owings and Merrill, l’une des plus prestigieuses sociétés d'architecture du monde) s’attellent à réinventer cette « pierre liquide ». « Après la Seconde guerre mondiale, ils commencent à se demander quelle est la nature de ce matériau, quelles sont ses potentialités structurelles et expressives. Le béton devient lui-même, avec un visage multiple. » La mentalité qui veut de lui qu’il représente la pierre le plus fidèlement possible s’estompe.
L’antithèse du Corbusier
Les bâtiments lisses et soignés vont donc essayer d’imiter la pureté de l’acier, au contraire de ce que préconisait Le Corbusier. Ce travail du béton, cette « pierre liquide » ne souffre ainsi aucun défaut. La granulométrie reste en place au décoffrage. La précontrainte, principal innovation de l’après-guerre, devient ainsi la plus sûre représentation du caspitalisme américain. Jusqu’aux années 1970, où le béton redevient une pierre artificielle, dans la recherche de l’image.
A New Era of American Architectural Concrete : from Wright to SOM, Roberto Gargiani, EPFL Press (en anglais).