La joie des genevois explose sur les réseaux sociaux
En octobre dernier, l’annonce de la démolition du cinéma Le Plaza, à Genève, choquait l’opinion au-delà de nos frontières. Mais le propriétaire de Rolex vient de racheter ce joyau d’architecture et d’histoire.
Fermée depuis vingt ans, la salle de cinéma était promise à la destruction. Figures politiques, acteurs culturels, Fédération des architectes suisses et, plus récemment, le groupe Facebook contre l’enlaidissement de Genève: la mobilisation citoyenne pour la sauvegarde du Plaza s’était pourtant constituée et tenait bon. Mais en mars dernier, le Conseil d’Etat invalidait l’initiative populaire cantonale «Le Plaza ne doit pas mourir», pourtant munie de plus de 11 000 signatures, la jugeant contraire au droit. Plusieurs conseillers d’Etat avaient tenté de faire classer le bâtiment, signé de l’architecte Marc-Joseph Saugey. Mais surprise en mars 2019 : les autorisations de détruire ce cinéma entrent en force. Le Plaza constitue pourtant un élément du complexe architectural d’intérêt, construit en 1952. Après la désolation de la population lorsque la démolition a commencé, on imagine la joie des genevois à l’annonce de la vente in-extremis du bâtiment à la Fondation Hans Wilsdorf, propriétaire des montres Rolex et Tudor. La salle sera donc rénovée et mise à la disposition des festivals.
Une technologie exceptionnelle à l’époque
Le Plaza est une salle unique car son architecte Marc-Joseph Saugey avait su rester en phase avec les dernières découvertes techniques du cinéma et concevait ses salles en conséquence. L’espace couvert, en légère pente, mène au guichet puis au foyer et à la salle de projection presque sans transition. Depuis le trottoir, les passants pouvaient voir l’immense écran panoramique s’ouvrant jusqu’à 12 mètres de largeur. L’intérieur se distingue par des espaces très généreux pouvant accueillir à l’époque 1250 personnes. La salle est supportée par six grands portiques en aluminium de 40 mètres. Un énorme balcon, pouvant accueillir un tiers des spectateurs, domine la salle d’un seul tenant grâce à un porte-à-faux exceptionnel.
La cage aux Folles
En janvier 2019, la Fondation Hans Wilsdorf a approché la famille Danon, détentrice de l’intégralité des parts de MBC. Marcello, le patriarche italien, producteur de cinéma – c’est à lui que l’on doit La Cage aux folles – avait acquis les immeubles en 1991. La transaction s’est concrétisée mercredi 7 août matin: les actions de MBC ont changé de mains. La fondation Hans Wilsdorf se retrouve en possession non seulement de la salle mais aussi des immeubles sis aux adresses 1-3 rue du Cendrier et 19-21 rue de Chantepoulet. La Tribune de Genève, à laquelle la fondation a confirmé être «l’acheteur» évoqué par le communiqué annonçant la transaction, rappelle que les personnes qui s’étaient mobilisées il y a quatre ans afin de racheter Le Plaza visaient une somme de 100 millions de francs. La famille Danon disposait de deux offres, glisse son conseil qui assure qu’elle a préféré renoncer à «quelques millions de plus» pour favoriser le projet Wilsdorf. «C’est une excellente nouvelle, a réagi Sami Kanaan, ministre de la Culture en ville de Genève. La mise à disposition d’une salle polyvalente pour les festivals mais aussi pour les acteurs culturels, universitaires et de la Genève internationale répond à un réel besoin. Nous ne pouvons qu’être reconnaissants envers la Fondation Hans Wilsdorf, qui était la seule capable de faire cela à Genève.» Sur les réseaux sociaux, depuis mercredi, les défenseurs du sauvetage de la salle ne cessent d’exprimer leur joie.